
Dans la mythologie nordique, Hermód est connu comme le messager des dieux et est souvent associé à la communication entre les différents mondes. Son voyage pour chercher Baldr (Baldur ou encore Balder) est l’une des légendes connues de ce personnage de la mythologie nordique. Découvrons ce personnage et son rôle dans le panthéon nordique.
I. Qui est Hermód dans la mythologie nordique ?
Hermód (ou Hermóðr en vieux norrois) est une figure singulière de la mythologie nordique, à la croisée des dieux et des héros. Fils d’Odin et de Frigg selon l’« Edda de Snorri », et frère du lumineux Baldr, Hermód est aussi désigné par l’épithète « le Vaillant », révélatrice de sa bravoure. Toutefois, sa nature demeure ambiguë : est-il une divinité majeure ou simplement un héros divinisé tardivement ? Cette incertitude provient du fait que dans des sources antérieures, comme les poèmes eddiques et scaldique, il apparaît davantage comme un héros que comme un dieu à part entière.
Son nom, issu des racines proto-germaniques hari (armée) et mod (courage, esprit), symbolise son essence martiale et son tempérament intrépide. Hermód est avant tout le messager divin des Ases, doté d’une capacité rare dans le panthéon nordique : celle de franchir les mondes, notamment celui des morts, Helheim. Sa rapidité, sa résistance mentale et physique, ainsi que son rôle d’intercesseur font de lui un pont entre les vivants et les morts, comparable en cela à Hermès dans la mythologie grecque. Il chevauche Sleipnir, le cheval à huit jambes d’Odin, signe qu’il est digne de porter les messages les plus sacrés et de mener les missions les plus périlleuses.
On le représente comme un homme jeune et vigoureux, avec une apparence athlétique et des traits du visage réguliers. Il est souvent représenté avec une cape et une coiffe, ainsi qu’avec un instrument de musique appelé le Gjallarhorn, sorte de Lur.
II. Le voyage de Hermód pour chercher Baldr
La légende la plus célèbre liée à Hermód est son périple vers le royaume des morts pour tenter de ramener son frère Baldr, tué par la ruse de Loki. Ce récit, détaillé dans le Gylfaginning de l’Edda en prose, met en lumière le courage surhumain d’Hermód. Alors que Frigg, éplorée, offre sa faveur à quiconque irait plaider auprès de Hel, seul Hermód se propose. Il monte Sleipnir et entame une chevauchée de neuf nuits à travers des ténèbres absolues jusqu’au pont Gjallarbrú, gardé par Modgud, qui reconnaît qu’il n’est pas un mort. Hermód parvient jusqu’à Hel, saute les grilles du royaume, et retrouve Baldr, assis sur un trône. Il plaide sa cause, et Hel, déesse des morts, accepte à condition que tout être pleure Baldr. Avant de repartir, Hermód reçoit de son frère des présents à remettre aux dieux : l’anneau Draupnir pour Odin, un tissu de lin pour Frigg et un anneau d’or pour Fulla.
Mais le plan échoue lorsque Thokk, une géante (en réalité Loki déguisé), refuse de pleurer. Cette ruse condamne Baldr à rester à Helheim jusqu’au Ragnarök. La mission d’Hermód se solde donc par un échec, mais elle révèle son abnégation, sa loyauté, et surtout son statut de messager intrépide, prêt à traverser les limbes pour tenter l’impossible.
Dans d’autres récits plus rares, Hermód apparaît dans le Hákonarmál, un poème scaldique du Xe siècle, où il est chargé avec Bragi d’accueillir le roi chrétien Hákon au Valhöll. Ici, Hermód n’est pas explicitement un dieu, mais plutôt une figure héroïque parmi les morts valeureux. Une autre légende, moins connue, mentionne une mission en Midgard où Hermód faillit périr en consultant un devin finnois à la demande d’Odin, preuve supplémentaire de sa fonction d’émissaire au service des desseins divins.
III. Ses amours et sa descendance
Les textes anciens ne rapportent aucune union ni descendance attribuée à Hermód. Contrairement à d’autres figures divines ou héroïques de la mythologie nordique, sa légende reste silencieuse sur toute éventuelle épouse, amante ou lignée. Ce silence narratif alimente l’idée qu’Hermód n’a jamais été pensé comme un dieu majeur du panthéon producteur de dynasties, mais plutôt comme un personnage fonctionnel, rattaché à des quêtes et des missions spécifiques.
Ce profil le rapproche des figures de passeurs ou d’émissaires dans d’autres mythologies, comme Hermès chez les Grecs ou Mercure chez les Romains, avec qui il partage le rôle de médiateur entre les mondes. Sa relation principale est donc celle de fraternité avec Baldr, pour qui il n’hésite pas à franchir les portes du royaume des morts.
IV. Son culte et son rôle dans le Ragnarök
Le culte d’Hermód semble avoir été marginal, voire inexistant à grande échelle dans la société nordique, surtout si on le compare à d’autres dieux comme Odin, Thor ou Freyja. Les textes anciens ne mentionnent aucun temple dédié, aucune cérémonie régulière, ni sacrifice en son honneur. Cette absence de traces concrètes dans les rites cultuels tend à confirmer l’hypothèse selon laquelle Hermód était à l’origine un héros mythique ou un roi légendaire, dont la figure aurait été élevée au rang divin dans les textes tardifs comme ceux de Snorri Sturluson. On note tout de même que son nom a laissé des empreintes dans la toponymie normande et anglaise (Hermeville, Harmondsworth), ce qui suggère une certaine notoriété à une époque plus ancienne.
En revanche, sa fonction de messager entre les mondes lui confère un statut particulier dans le panthéon nordique. Hermód n’est ni un dieu guerrier, ni un créateur, ni un juge. Il est celui qui traverse, celui qui tente de restaurer un équilibre brisé — en l’occurrence, celui du cycle de vie et de mort après la perte de Baldr. À ce titre, certains spécialistes modernes y voient un parallèle avec la figure du psychopompe, et une parenté fonctionnelle avec Hermès ou Mercure. Il est l’un des rares à avoir franchi les frontières infranchissables de Helheim, sans y mourir.
Quant à son rôle dans le Ragnarök, les textes sont silencieux. Contrairement à des figures comme Thor, Heimdall ou Loki, qui ont tous des rôles bien définis dans la bataille finale, Hermód ne semble pas y prendre part. Toutefois, l’échec de sa mission pour sauver Baldr le relie indirectement au Ragnarök. En effet, la non-résurrection de Baldr scelle la perte d’espoir chez les Ases et précipite leur chute. Hermód, par sa tentative vaine, est ainsi un acteur silencieux de la mécanique tragique qui mènera à la fin du monde nordique.
Dans la bande dessinée, il fait une apparition notable dans la série Walkyrie (éditions Soleil Celtic), où il est présenté comme l’un des derniers Ases, fidèle à ses origines de messager et de protecteur. Cette version moderne renforce sa dimension héroïque et tragique. Dans l’univers de Marvel Comics, il apparaît pour la première fois dans Thor n°274 (1978), aux côtés des autres dieux nordiques, bien que son rôle y reste discret comparé à celui de Thor, Loki ou Odin.
La musique métal nordique, qui puise souvent dans les mythes scandinaves, lui rend également hommage. Le groupe suédois Amon Amarth, pilier du death metal mélodique, a consacré une chanson entière à sa chevauchée vers Hel : Hermod’s Ride to Hel (Lokes Treachery Part 1) dans l’album With Oden on Our Side (2006). Le titre met en avant son courage, sa loyauté et sa volonté farouche de sauver son frère, autant de qualités célébrées dans l’imaginaire viking moderne.