Éléos, déesse de la Pitié, incarne la compassion et la miséricorde dans la mythologie grecque. Bien que moins connue que d’autres divinités, son existence témoigne de l’importance accordée à ces vertus dans la culture grecque antique.

I. Origines et Généalogie d’Éléos
Elle est issue d’une lignée primordiale : fille de Nyx (la Nuit) et d’Érèbe (les Ténèbres), elle appartient à cette génération de divinités conceptuelles, nées des premières puissances du monde avant même l’ordre olympien. Elle a pour frères Charon – le passeur des Enfers –, Éther – l’air pur du ciel supérieur –, et Épiphron – la prudence –, et pour sœur Héméra, la personnification du jour. Cette généalogie la relie à des symboles puissants de transition, d’équilibre et de jugement, dans une famille où cohabitent la lumière, la nuit et la mort.
Par son essence, Éléos s’oppose à Anaideia, figure de l’impitoyabilité.
II. Les légendes qui l’entourent
Contrairement aux grandes divinités de l’Olympe, Éléos n’est pas au centre de récits épiques ou de mythes guerriers. Sa présence se manifeste plus dans l’attitude et les valeurs que dans l’action : elle incarne une force morale plutôt qu’un personnage de légende. Dans la tradition grecque, elle est mentionnée surtout pour son rôle de recours ultime pour les affligés, les mendiants ou les suppliants. En cela, elle devient une figure d’accueil et de refuge, parfois invoquée au cœur des tragédies ou des quêtes de rédemption. Elle est parfois représentée comme une suivante de Melpomène, la muse de la tragédie, ce qui souligne son association avec les drames humains, les implorations et les cris silencieux des opprimés.
III. Culte et Vénération à Athènes
Le culte d’Éléos se concentrait uniquement à Athènes, preuve que certaines cités-États privilégiaient des divinités en lien étroit avec leur identité politique et sociale. Son autel, que décrit le poète Stace, n’était pas associé à une puissance dominante mais à une force douce et éthique : un lieu sacré pour les affligés, les miséreux et les suppliants, au cœur même de la cité. Les gestes rituels pratiqués en son honneur étaient hautement symboliques : on offrait des mèches de cheveux et des vêtements, marques d’humilité et de dépouillement, en reconnaissance ou en imploration. Ce dépouillement renvoyait à l’état de vulnérabilité nécessaire pour recevoir la compassion divine.
IV. Ses amours et sa descendance
Les sources mythologiques ne lui attribuent aucun compagnon ni descendance connue, ce qui correspond à la nature essentiellement allégorique de cette divinité. Comme beaucoup de figures personnifiant des vertus ou des concepts abstraits, Éléos n’interagit pas par des liens amoureux ou familiaux, mais par la transmission de son essence dans les actes humains.
À Rome, elle devient Misericordia ou Clementia, figures qui influenceront la morale chrétienne autour du pardon, de la charité et de la compassion. Dans notre vocabulaire, son nom grec est resté à travers des notions comme « éléos », encore utilisé en théologie pour désigner la pitié divine.