Dans la mythologie égyptienne, de nombreuses divinités occupent une place clé, chacune ayant ses caractéristiques et ses histoires uniques. Parmi elles, Banebdjedet, le dieu bélier, se démarque par sa symbolique. Explorons en détail la vie et les légendes entourant Banebdjedet, seigneur de Mendès, un personnage mythologique fascinant qui incarne la force et la fertilité.

I. Banebdjedet : Le dieu bélier
Dans la mythologie égyptienne, il est représenté sous la forme d’un puissant bélier. Il est souvent associé à la fertilité et à la renaissance. Banebdjedet est l’un des dieux les plus singuliers du panthéon égyptien, associé dès l’Ancien Empire à la ville de Mendès (Djedet), dans le delta oriental du Nil. Son nom, « Seigneur du Ba de Djedet », évoque directement son lien avec le principe vital (le Ba) et son territoire sacré. Il incarne la fécondité, la génération et le pouvoir créateur, qualités renforcées par son animal totem, le bélier, réputé pour sa vigueur sexuelle. Il est parfois vu comme une manifestation du Ba d’Osiris, dont l’essence aurait trouvé refuge à Mendès après sa mise à mort par Seth. Par cette attribution, Banebdjedet s’impose aussi comme un dépositaire du souffle divin de la royauté et de la résurrection. Protecteur des forces reproductrices, il est à la fois gardien de la vie, père symbolique, et arbitre dans les conflits des dieux, comme le montre son rôle dans la querelle entre Seth et Horus.
Selon les mythes égyptiens, il serait né de l’union de Rê, le dieu soleil, et d’une déesse vache appelée Mehtouret. Cet étrange mélange entre un bélier et une vache lui confère des attributs uniques et une place spéciale dans la mythologie égyptienne. On raconte que lors de sa naissance, il émit un cri qui résonna dans tout le royaume des dieux, annonçant l’arrivée d’un être divin d’une grande importance.
La fertilité était un aspect essentiel de la vie égyptienne, car elle assurait la prospérité et la survie de la communauté. Banebdjedet était étroitement associé à la fertilité des terres agricoles et du bétail. On croyait que ses bénédictions favorisaient des récoltes abondantes et la multiplication du bétail, assurant ainsi la subsistance du peuple égyptien. Les agriculteurs et les éleveurs l’invoquaient dans leurs prières et leurs rituels pour obtenir sa bienveillance et sa protection.
Dans les représentations artistiques, Banebdjedet apparaît le plus souvent sous la forme d’un dieu à tête de bélier, ou comme un bélier sacré debout sur ses pattes, souvent couronné de l’atef et tenant le symbole ânkh de la vie. Son apparence puissante rappelle un ancien type de bélier à cornes horizontales aujourd’hui disparu, renforçant la dimension archaïque et primordiale de sa figure. L’iconographie tardive le montre dans des postures majestueuses, incarnant l’autorité divine sur les cycles de la vie, de la sexualité et de la succession dynastique.
II. Les exploits de Banebdjedet
Banebdjedet occupe une place ambivalente dans l’une des plus importantes controverses divines du panthéon égyptien : la rivalité opposant Horus à Seth pour l’héritage du trône d’Osiris. Ce mythe complexe, central dans la théologie égyptienne, s’inscrit dans un cadre judiciaire céleste où les dieux siègent en tant que membres d’un tribunal cosmique. Banebdjedet y est sollicité en tant qu’arbitre, preuve de la reconnaissance de son autorité morale et politique. Pourtant, sa réponse démontre autant sa sagesse que sa prudence : conscient de l’enjeu, il délègue la décision à Neith, une déesse respectée pour sa sagesse ancestrale.
Mais la position de Banebdjedet évolue au fil du récit. Dans une version du mythe, il suggère finalement que Seth obtienne le trône, au motif qu’il est l’aîné, suivant une logique patriarcale traditionnelle. Cette proposition détonne avec le soutien que d’autres divinités accordent à Horus, héritier légitime selon la lignée d’Osiris. En proposant Seth comme souverain, Banebdjedet ne prend pas position contre Horus, mais incarne une conception plus conservatrice du pouvoir, fondée sur l’ancienneté plutôt que sur la filiation directe. Ce rôle d’arbitre indécis ou trop diplomate lui a parfois été reproché dans les commentaires tardifs, mais il reflète aussi la complexité du mythe égyptien, où l’ordre du monde est un équilibre fragile entre légitimité, ancienneté et force.
III. Ses amours et sa descendance
Banebdjedet est uni à Hatméhyt, déesse aquatique au symbole de poisson, qui fut, selon la tradition, une des premières à rechercher les membres épars d’Osiris. elle est son parèdre. Ensemble, ils forment avec leur fils Harpocrate (Horus l’Enfant) la triade de Mendès, typique des centres cultuels égyptiens où la divinité locale est représentée dans une unité familiale divine. Ce couple symbolise la fertilité en son sens le plus complet : Banebdjedet par sa puissance générative, Hatméhyt par ses qualités nourricières et protectrices.
Une légende plus tardive rapportée dans une stèle du Ramesséum raconte que le dieu Ptah prit l’apparence de Banebdjedet pour s’unir à une mortelle, de cette union naquit le futur pharaon Ramsès II, renforçant le mythe royal d’une naissance divine et sacralisant la lignée du souverain par la figure du dieu bélier.
Le culte de Banebdjedet était établi à Mendès, l’une des cités religieuses majeures de la Basse-Égypte. Cette ville, aussi appelée Per-Banebdjedet (« le domaine du Ba du seigneur de Djedet »), devint au fil des siècles un haut lieu de dévotion où l’on vénérait le dieu sous forme vivante à travers un bouc sacré, traité comme une incarnation terrestre du dieu. Ce culte, marqué par des pratiques de fertilité, choqua certains observateurs grecs comme Hérodote, qui le comparèrent à celui de Pan, et racontèrent qu’un roi perse perdit la raison après avoir profané le temple et mangé le bouc sacré. Banebdjedet portait le titre suggestif de « Seigneur du plaisir sexuel », montrant l’importance que les Égyptiens attribuaient à la vigueur et à la reproduction dans leur cosmologie. Le temple de Mendès connut son apogée sous la XXIXe dynastie, époque durant laquelle la ville fut capitale et résidence royale, ancrant profondément la figure du dieu dans le tissu religieux et politique de l’Égypte ancienne.