
Plongez au cœur d’un choc titanesque entre dieux, rois déchus, magiciens et monstres marins. La Seconde Bataille de Mag Tuired, véritable pilier de la mythologie celtique irlandaise, ne fut pas une simple guerre pour le trône : c’était un affrontement entre lumière et ténèbres, entre domination et libération, entre les légendaires Túatha Dé Danann et les terrifiants Fomoire. Cette épopée regorge de héros surpuissants, de talismans magiques, d’alliances surnaturelles, et d’une poésie guerrière qui traverse les siècles. Des druides prophétiques aux lames chantantes, chaque détail de cette bataille nourrit l’imaginaire irlandais jusqu’à aujourd’hui. Découvrons ensemble cette légende fondatrice.
I. Origines et contexte du Second Combat de Mag Tuired
Le Second Combat de Mag Tuired est l’un des récits fondateurs de la mythologie celtique irlandaise. Mais pour comprendre pleinement cette bataille épique, il est indispensable de remonter aux origines du conflit et d’explorer le contexte historique et mythologique dans lequel il s’inscrit. Pourquoi les Tuatha Dé Danann ont-ils dû affronter les Fomoires, ces entités sombres et terrifiantes ? Qu’est-ce qui a conduit à ce choc titanesque ?
Les Tuatha Dé Danann, littéralement « les tribus de la déesse Dana », sont souvent dépeints comme un peuple divin et surhumain. Maîtres des arts, de la magie et des sciences, ils représentent la lumière, la connaissance et l’harmonie. Enracinés dans la terre d’Irlande, ils incarnent la richesse et la fertilité de l’île. Mais leur règne est constamment menacé par une force sombre : les Fomoires.
Les Fomoires, eux, symbolisent les éléments primordiaux et imprévisibles : la tempête, la mer déchaînée, le chaos. Décrits comme des géants marins difformes, ils vivent aux confins de l’Irlande, souvent sur des îles ou sous la mer. Leur leader, Balor, est une figure de terreur : un géant cyclopéen dont l’œil unique peut tuer quiconque croise son regard.
II. Les causes du conflit
Le Second Combat de Mag Tuired trouve ses racines dans une oppression systématique. Après leur victoire lors du Premier Combat de Mag Tuired, les Fomoires imposent un lourd tribut aux Tuatha Dé Danann. Chaque année, ces derniers doivent livrer une grande partie de leurs récoltes et de leur bétail. Ce régime tyrannique étouffe le peuple de Dana.
III. Les personnages clés de la Seconde Bataille de Mag Tuired
Parmi les figures majeures, Lug Lámfada (« au long bras »), l’enfant prodige aux multiples talents, se révèle être le pivot du récit : fils de Cían et d’Eithne (elle-même fille du roi Fomoire Balor), il incarne l’alliance improbable entre les deux races ennemies.
Le roi Nuada Airgetlám, mutilé à la première bataille, reprend temporairement la royauté avant de tomber sous l’œil mortel de Balor. Le Dagda, « dieu bon » et chef spirituel, dirige les préparatifs en compagnie d’Ogma, champion des armes et des mots. Côté Fomoire, Balor et son œil destructeur, Indech mac Dé Domnann, roi de guerre, et Bres mac Elatha, tyran honni par son peuple, constituent les piliers d’un empire brutal. La Morrigan, déesse de la guerre et de la prophétie, joue quant à elle un rôle charnière en semant la terreur parmi les ennemis et en annonçant l’issue du conflit.
IV. Le déroulement du Second Combat de Mag Tuired
L’affrontement se prépare bien avant le premier coup d’épée, lorsque les Túatha Dé Danann, écrasés par la domination tyrannique des Fomoire sous le règne de Bres, décident de reconquérir leur liberté. L’arrivée du héros Lug, le Samildánach — “celui qui maîtrise tous les arts” — marque un tournant : grâce à sa ruse, sa force et son éloquence, il rallie les forces magiques, militaires et artisanales de son peuple.
Durant une année entière, les préparatifs s’intensifient : les forgerons comme Goibniu reforgent les armes à l’infini, les druides manipulent les éléments, les guérisseurs préparent la Fontaine de Santé, et la Morrigan, la déesse guerrière, scelle une alliance charnelle et mystique avec le Dagda. À l’aube de Samain, les deux armées se font face. D’un côté, les Fomoire, menés par Balor à l’œil maléfique, Indech et Bres, se tiennent en formation de fer, cuirassés et bardés de magie sombre. De l’autre, les Túatha, galvanisés par Lug, dévoilent leurs talents surnaturels et leur cohésion sacrée.
Le champ de bataille devient alors théâtre d’une guerre mythologique d’une rare intensité. Balor terrasse le roi Nuada, mais Lug parvient à vaincre son propre grand-père d’une pierre lancée dans son œil destructeur, retournant son pouvoir contre son propre camp. Tandis que les druides appellent les montagnes, les forgerons reforgent les lames, et les morts ressuscitent grâce aux sortilèges de la fontaine de Sláine, les Fomoire ploient sous la puissance combinée de la magie, de la stratégie et de la vengeance. La Morrigan, en furie, sème la désolation dans les rangs ennemis.
Lorsque la poussière retombe, les Fomoire sont repoussés vers la mer, leurs chefs tombés ou capturés, et l’Irlande, enfin libérée, renaît sous le signe de Lug.
V. Amours et descendance des protagonistes principaux
L’histoire est également tissée de filiations mythiques et d’unions aux implications politiques et symboliques. L’union d’Eithne, fille du Fomoire Balor, et de Cían, membre des Túatha Dé Danann, engendre Lug, personnage messianique dont le sang mêlé scelle une forme de réconciliation entre les mondes opposés.
Cette naissance résulte d’un enlèvement céleste et d’une rencontre magique, révélant la beauté surnaturelle d’Elatha, père de Bres, venu en navire d’argent. Bres lui-même, enfant d’Eri et d’Elatha, est présenté comme un être d’une beauté inégalée, mais dont la lignée croisée n’engendrera que souffrance et discorde.
La déesse Morrigan, amante du Dagda, conçoit avec lui une union mystique à la veille de la bataille, renforçant le lien entre souveraineté, terre et guerre. Le fruit de ces amours est moins tangible que symbolique : il s’agit d’un renforcement magique du camp des Túatha, mais aussi d’une prophétie sur les cycles futurs de la guerre et de la paix en Irlande.
La Seconde Bataille de Mag Tuired constitue un fondement de l’identité mythologique irlandaise. Elle cristallise les valeurs celtiques de bravoure, de sagesse et d’équilibre entre les forces naturelles. Son récit est demeuré vivace dans la tradition orale, puis consigné dans le manuscrit Harleian 5280, influençant la perception de la royauté, du droit et de l’honneur en Irlande médiévale. Les symboles issus de cette bataille – tels que la pierre de Fal ou les dons de Lug – traversent les siècles, jusqu’à réapparaître dans la littérature contemporaine, le théâtre, la musique, et même dans les œuvres fantasy modernes.
Le personnage de Lug a été comparé à Hermès ou à Ulysse, tant pour sa polyvalence que pour son rôle de médiateur entre les mondes. Quant à la Morrigan, elle inspire toujours artistes et écrivains fascinés par la figure de la femme guerrière et prophétique.