Représentation de la Légende du Chevalier Vert - mythologie celtique - AI generated
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Le Chevalier Vert est une figure incontournable de la littérature médiévale, principalement connue grâce au poème « Sire Gauvain et le Chevalier vert ». Ce personnage énigmatique, entièrement vêtu de vert, défie les chevaliers de la cour du roi Arthur, mettant à l’épreuve leur courage et leur honneur. Découvrez cette légende celtique, typiques des mythes de la Table Ronde.​

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I. Origines du Chevalier Vert

Le Chevalier Vert, figure énigmatique du poème Sire Gauvain et le Chevalier Vert (XIVe siècle), est l’incarnation d’un noble seigneur nommé Bercilak de Hautdésert, transformé magiquement par Morgane la fée — demi-sœur du roi Arthur — dans le but de tester la valeur morale de la cour arthurienne. Il est aussi connu sous d’autres noms selon les versions : Bredbeddle dans The Greene Knight et King Arthur and King Cornwall, où il est décrit comme un puissant chevalier et un exorciste. Sa peau entièrement verte, des cheveux aux doigts, intrigue depuis des siècles : elle a été interprétée tantôt comme une allégorie de la fertilité et du renouveau, à l’image de l’« Homme Vert » des traditions païennes, tantôt comme une émanation celtique, voire comme une figure infernale ou christique. Cette ambiguïté chromatique fait de lui un arbitre à la fois surnaturel et moral.

Face à lui se tient Gauvain, neveu du roi Arthur, fils du roi Lot d’Orcanie et de la reine Morgause. Dans la tradition arthurienne française, Gauvain est un personnage clé, mais il est souvent éclipsé par Lancelot ou Perceval. Dans la tradition anglaise, en revanche, il est un modèle de chevalerie, notamment dans cette légende où il occupe la place centrale. Loyal, pieux, vaillant et courtois, Gauvain est ici à la fois le champion de la cour d’Arthur et l’archétype du chevalier mis à l’épreuve sur le plan moral. Son humanité se révélera dans ses limites autant que dans sa bravoure.

Le symbolisme de la couleur verte a suscité diverses interprétations. Certains y voient une incarnation de l’Homme Vert, une figure païenne représentant la nature et le renouveau. D’autres y perçoivent une allégorie du diable ou une personnification de la mort, reflétant les dualités de la vie et de la mortalité. ​

II. Le mythe du Chevalier Vert

La légende principale du Chevalier Vert commence au château de Camelot, lors de la célébration du Nouvel An. Le festin royal est interrompu par l’arrivée spectaculaire d’un géant verdoyant, armé d’une immense hache et d’un rameau de houx. Ce dernier lance un défi : qu’un chevalier ait le courage de lui trancher la tête, à condition de subir la réciproque un an plus tard. Gauvain accepte, et d’un seul coup d’épée, décapite l’intrus. Contre toute attente, le Chevalier Vert se relève, saisit sa propre tête qui l’interpelle une dernière fois, rappelant le rendez-vous fixé dans un an à la mystérieuse Chapelle Verte.

Dix mois plus tard, fidèle à son honneur, Gauvain part seul sur les routes à la recherche du lieu convenu. Après de nombreuses épreuves, il trouve refuge peu avant Noël au château de Hautdésert, propriété du seigneur Bertilak, homme affable et hospitalier — en réalité, le Chevalier Vert dissimulé sous son apparence ordinaire. Celui-ci propose à Gauvain un jeu : chaque jour, ce que chacun gagnera durant la journée sera offert à l’autre. Tandis que Bertilak part à la chasse, son épouse tente de séduire Gauvain à plusieurs reprises. Par loyauté envers son hôte et fidélité à ses valeurs, Gauvain refuse les avances, n’acceptant que des baisers qu’il restitue ensuite à Bertilak lors de l’échange du soir.

Le troisième jour, cependant, la dame lui offre une ceinture verte magique censée le protéger de la mort — un don que Gauvain accepte secrètement, brisant le pacte de l’échange. Le jour venu, il se rend à la Chapelle Verte. Là, le Chevalier Vert apparaît avec sa hache, prêt à rendre son coup. Il assène trois coups symboliques : les deux premiers sont feints, récompensant la sincérité de Gauvain les deux premiers jours ; le troisième entaille légèrement son cou, punissant la dissimulation de la ceinture.

Mais le Chevalier Vert ne se contente pas de cette leçon. Il révèle alors sa véritable identité — Bertilak, métamorphosé par Morgane pour éprouver le roi Arthur et ses hommes — et excuse la faute de Gauvain, la qualifiant de faiblesse humaine excusable. Honteux mais grandi, Gauvain choisit de conserver la ceinture comme symbole de sa faille et de son apprentissage.

III. Amours et descendance

La légende du Chevalier Vert n’est pas centrée sur les histoires d’amour au sens romantique, mais celles-ci jouent un rôle central dans les épreuves. La femme de Bertilak, personnage aussi séduisant que rusé, incarne la tentation, l’épreuve de la chair face aux vertus chevaleresques. Gauvain, fidèle à ses valeurs mais tiraillé par la courtoisie et la prudence, résiste sans totalement se soustraire à ses avances : il accepte des baisers, mais refuse tout acte compromettant. Il cède cependant à la peur de la mort en gardant pour lui la ceinture protectrice.

La légende du Chevalier Vert continue de fasciner artistes, cinéastes et écrivains modernes, en raison de sa richesse symbolique et de son ambiguïté morale. Elle questionne la nature de la bravoure, l’honneur face à la peur de la mort, la sincérité dans l’éthique chevaleresque. L’un des traitements les plus marquants de ce mythe est le film The Green Knight (2020) de David Lowery, qui en propose une relecture visuellement envoûtante, teintée de mysticisme, de sensualité et de méditation existentielle. J.R.R. Tolkien, fasciné par la langue et les symboles du récit, en proposa une traduction majeure. Dans la culture populaire, le Chevalier Vert a également été cité dans la série Adventure Time ou encore Cursed, preuve que la figure du juge initiatique, du miroir de la vertu, conserve toute sa force dans l’imaginaire contemporain.